DOMAINE PUBLIC
Complexe et difficile à mettre en œuvre, mais pas impossible
Espaces publics étouffés par l’installation anarchique
Les espaces publics étouffés par l’installation anarchique des « commerçants des rues » des villes burkinabè. Cette occupation informelle des espaces, en bordure des voies de circulation est souvent observée dans les rues des villes africaines. Ouagadougou et les autres grandes villes du pays n’y échappent pas, parfois même considérée comme l’une des caractéristiques essentielles du « charme » des villes africaines.
A qui les torts ?
Le commerçant « entre guillemets », la taxe prélevée par les mairies n’est pas très importante, il est très fréquent aussi qu’elle ne soit pas réclamée par manque de solvabilité. Les boutiquiers, travaillant de façon informelle et qui ne peuvent se permettre d’occuper les espaces « légaux », s’installe, en toute illégalité, avec la complicité du propriétaire qui lui fait payer un loyer, sur le domaine public et les ouvrages d’assainissements des grandes cités du pays.
Les espaces « légaux » disponibles ne répondent pas forcément aux attentes de nos marchands, qui, sans avoir fait d’étude de marketing, ont compris qu’il est plus rentable d’être en périphérie d’un marché pour profiter de la multitude de clients plutôt que dans un espace excentré et peu visible.
En outre pour beaucoup, les espaces «légaux» ne répondent pas à leurs attentes: espaces excentrés, pas assez visibles, trop petits, trop chers etc. L’occupation des espaces publics sur les voies très fréquentées de nos villes, permet, encore une fois, au commerçant de profiter de l’affluence du chaland.
Les pouvoirs publics locaux qui récoltent une taxe sur chaque emplacement informel, participant ainsi à la pérennisation d’un comportement antisocial au détriment des riverains.
Les propriétaires qui autorisent et louent en toute illégalité l’espace public à des pseudo-commerçants par ignorance, ou pas, des textes, qui fait qu’ils considèrent la devanture de leur maison et les abords immédiats des voies longeant leur maison comme leur propriété, allant même jusqu’à fournir l’électricité et l’eau.
Urbanisation civique
Le Burkina Faso, pays en voie de développement, à l’instar d’autres pays du continent, est confronté à un problème d’urbanisation intensive soutenu par les flux migratoires conjoncturels et sociaux économiques. Les décideurs n’ont pas d’autres choix que de se pencher sur le dossier de la gestion urbaine et de prendre en considération la poussée de la population en demande d’espace pouvant accueillir leurs espoirs économiques.
L’occupation des trottoirs par les activités commerciales est à l’origine de problèmes d’engorgement et de congestion urbaine. Les nombreux stationnements de motos, de trois roues et de voitures sur la chaussée, et surtout l’encombrement par des étalages et marchandises, contraignent les piétons à même circuler sur la voie et sont en grande partie responsables des difficultés de circulation, surtout aux heures de pointe, allongeant considérablement les temps de trajet dans la capitale économique ainsi que dans toutes les principales communes du pays.
Certains quartiers particulièrement touchés par ce phénomène, sont alors évités par les usagers qui préféraient contourner ces espaces. Dans certains d’entre eux, la circulation automobile est tout bonnement impossible à certaines heures.
Ce qui empêche la libre circulation des personnes et des biens. Les occupations anarchiques des trottoirs obligent la plupart du temps, les piétons à disputer la route avec les motocyclistes; ce qui cause des accidents mortels pour les enfants, notamment les écoliers. Il semble que ce simple constat suffise à obliger les pouvoirs publics de prendre ses responsabilités en libérant ces espaces en vue de faciliter la mobilité humaine.
Extrait de la loi N°034/2012/AN portant réorganisation agraire et foncière au Burkina Faso stipule que «les aménagements et les ouvrages de toute nature réalisés dans un but d’intérêt général ou d’utilité publique ainsi que les terres qui les supportent, déterminés par la loi ou ayant fait l’objet d’une procédure de classement ou d’incorporation ».
Aucune loi n’a prévu cette disposition créée par les populations elles-mêmes, pour occuper l’espace public de l’Etat car, même les boutiques qui devraient être à l’intérieur des parcelles, sont ouvertes sur les grandes rues.
Les questions sont posées, voulez-vous un cadre de vie agréable ou désagréable, voulez-vous des villes plus propres ou sales comme aujourd’hui, voulez-vous une circulation plus fluide ou attendre dans les embouteillages ? Est-il besoins d’attendre les réponses ? Qui s’opposera à ces arguments ? Les pseudo-commerçants assurément, mais pas la majorité des utilisateurs des espaces publics.
Le mal est fait, quelles méthodes utiliser pour y remédier,
Le dossier est épineux, il faut donc prendre des pincettes et retirer les épines une à une sans se précipiter, prendre son temps sera la clé de la réussite du retour à des espaces publics aérés.
Ce projet peut s’étaler sur une dizaine d’année, ce qui est très court à l’échelle d’un pays. Les retombées seront nombreuse, il permettra la régularisation des entrepreneurs aujourd’hui hors la loi, des ressources fiscales supplémentaires, l’assainissement de la concurrence déloyale puisque illégale, l’assainissement de la ville par l’action ciblé des squatteurs du domaine public, une prise conscience de l’espace à partager entre citadins, l’attractivité de la ville et bien d’autres apports non identifiés encore.
La première étape consistera à identifier les commerçants informels des « commerçants informels ».
Le terme d’informel est, au Burkina Faso, une appellation fiscale liée à un régime de contribution fiscale du secteur informel, mais il a aussi une connotation libertaire, qui n’admet, donc, aucune limitation de la liberté individuelle et qui laisse croire que l’on peut tout faire sans aucunes obligations, c’est cette confusion du terme employé qui sème le trouble.
Il faut rapidement clarifier cet état de fait qui laisse à penser que l’informel est un droit sans obligation de contribution ni de participation à la vie du pays.
L’informel tel que nous le constatons tous les jours sera défini par « Qui n’est pas organisé de façon officielle ». En deux mots celui qui n’a pas de document délivré par la maison de l’entreprise (carte de commerçant ou N° IFU et RCCM, ne peut pas exercer et ne peut donc pas ouvrir une boutique. Si cette procédure est mise en place efficacement et avec détermination, l’implantation de ces occupants illégaux va ralentir progressivement.
Deuxième étape consistera, dans un premier temps, à identifier, dans une rue sélectionnée, où les boutiques débordent sur les espaces publics, les commerçants qui ne peuvent justifier d’un statut d’entrepreneur. A cette étape il ne s’agit pas de lui reprocher d’être sur le domaine public, mais bien de ne pas être en conformité avec sa situation professionnelle. La stratégie consiste à s’adresser à un individu et non à un groupe d’individu.
Dans cette même rue, aller à la rencontre des propriétaires ou locataires qui occupent les habitations devant lesquelles les boutiques sont posées. Vérifier si l’emplacement est exploité par l’habitant, ou s’il a donné une autorisation ou s’il a loué l’espace au commerçant. Commencer à les informer de la situation d’illégalité dans laquelle ils se sont placés.
Dans cette première phase, il ne s’agit pas de sanctionner, mais bien d’informer l’ensemble des protagonistes que la situation telle quelle est aujourd’hui ne peux pas durer et que les autorités sont disposées à faire régner la loi et réattribuer à l’usager burkinabè lambda l’espace auquel il a droit.
A l’instar des pays voisins, le Burkina Faso pourrait passer en force pour faire respecter la loi, cependant, cette solution n’est pas inscrite dans l’ADN du peuple des hommes intègres qui, naturellement, préfère négocier que guerroyer. Ouahigouya, en 2016, par l’intermédiaire du Préfet Président de la Délégation Spéciale de Ouahigouya a procédé au déguerpissement de cinquante botiques et Kiosques de la rue Banfora en application d’une délibération du conseil municipal, avec peu de contestation semblerait-il, l’expérience serait profitable.
En janvier 2020, le service Communication et des Relations Publiques de la mairie centrale de Ouagadougou, à grand renfort de message, faisait savoir à la population, qu’une machine de chantier avait détruit un bâtiment illégalement construit dans le secteur 28. Il semble que cette opération soit inscrite dans la lutte contre l’occupation anarchique de l’espace public…Force est de constater que l’opération c’est arrêté après cet action.
Pourquoi ne pas associer les populations au projet. Cela permettrait de réfléchir aux conséquences et de dégager des pistes de solutions possibles. Par exemple, on pourrait retenir un ou deux arrondissements témoins où on casse et on reconstruit progressivement tout en traitant plus facilement les conséquences. On pourrait aussi choisir par quartier, une rue dédiée provisoirement aux commerces de proximité, en attendant de libérer des réserves administratives indument affectées à d’autres fins, pour construire des marchés locaux.
Exemple du Bénin*
« Si le client veut votre produit, il viendra le chercher là ou vous êtes » Ainsi s’exprimez le Président des Béninois au sujet des squatters d’espaces public et d’ajouter que rien ne peut justifier cette occupation si ce n’est notre laxisme.
Sur le plan environnemental Aujourd’hui les avis et appréciations commencent par changer. Nombreux sont les citoyens qui admirent les résultats de cette opération qui a donné un nouveau visage à toutes les villes du pays en général et à la Commune d’Abomey en particulier. Pour 80 % des perceptions locales, avec le déguerpissement, l’air circule bien, les eaux et déchets qui jonchaient les voies ont disparu, les populations respirent mieux et elles se sentent en sécurité sur les axes routiers. Plusieurs personnes trouvent salutaire cette opération qui met de l’ordre partout. Pour ces derniers, l’opération a rendu attrayant la ville ce qui attire les investisseurs. Par ailleurs, la libération des espaces a permis le démarrage du projet asphaltage dans le milieu de recherche.
Effets néfastes de l’opération de déguerpissement Bien qu’étant appréciée par les populations de Hounli, l’opération de déguerpissement a affecté négativement le développement des activités socio-économiques. En effet la destruction des installations humaines situées aux abords des voies a entrainé une instabilité au niveau des activités économiques et l’augmentation de la pauvreté dans le rang des sinistrés. Cela se traduit par les difficultés de remboursement des crédits auprès des structures financières, l’amenuisement des revenus au niveau des ménages. A cela s’ajoute l’amenuisement à la municipalité car les impôts et taxes qui alimentent les caisses ne sont plus consistants puisque les activités tournent au ralenti.
*Extrait de la presse béninoise